BAKOU LA FLAMBEUSE

BAKOU LA FLAMBEUSE

Quartier historique rutilant, folies architecturales et bling à tous les étages… La capitale d’Azerbaïdjan surprend

Entre palais délirants et architecture soviet, Bakou a aussi des airs de Dubai. La capitale de l’Azerbaïdjan réserve bien des surprises et se rêve en nouvelle destination sur fond d’or noir.
 
Chambre 1123, hôtel Apchéron, Bakou. L’écrivain Olivier Rolin imagine sa propre mort dans Suite à l’hôtel Crystal. Quelques années plus tard, il signe Bakou, derniers jours, un portrait de « la Ville des vents ; froids, dévalant les steppes de la Volga, chauds, venus d’Iran ou Dieu sait d’où (…). » Mais il y a bien mieux à faire à Bakou que d’y mourir ! La capitale azérie est une ville comme nulle autre, entre mer Caspienne et déserts, Europe et Asie. Étape sur l’ancienne route de la soie, on s’y balade au milieu des caravansérails, du Palais des shahs de Shirvan et de la tour de la Vierge (du VIIe ou du XIIe siècle selon les historiens) : la légende dit qu’une jeune fille s’y serait jetée pour fuir les ardeurs trop pressantes de son père. Listée au patrimoine mondial de l’Unesco, la vieille ville est un mouchoir de poche aux ruelles sinueuses et balcons fleuris. Trop rénovée, elle sème la confusion. On cherche en vain les cicatrices du temps : les vieilles pierres, ici, sont tellement lustrées qu’elles semblent neuves.
 
Ville de brut
 
À la fin du XIXe siècle, les barons du pétrole font construire d’extravagantes maisons-palais conjuguant les styles mauresque, gothique et rococo. Le brut permet toutes les folies, comme celle des frères Mailov qui érigent l’Opéra municipal en un an pour accueillir la soprano russe Antonina Nezhdanova. La demeure du philanthrope illettré Haji Zeynalabdin Taghiyev témoigne de cette culture tournée vers l’Europe et l’Asie avec ses salles de réceptions thématiques, son boudoir au plafond tout en miroirs et sa chambre Sécession. Reste à voir (à défaut d’essayer) le hammam Fantasia, au charme décadent victorien – qui mériterait une rénovation.
 
Dubai de la Caspienne
 
Tout autour, les maisons aux balcons couverts de vigne vierge centenaire tombent les unes après les autres. Bakou rase son passé pour ériger des gratte-ciel, se rêve en Dubai avec ses Flame Towers symbolisant le feu de la ville. Zaha Hadid vient de signer le Centre culturel Heydar Aliyev (musée, salles d’expositions, bibliothèque et centre de congrès), un complexe monumental tout en ondulations futuristes. Un bâtiment en forme de tapis à demi roulé accueillera bientôt le musée du Tapis… Ces genres hétéroclites se mêlent à l’héritage architectural soviétique. La maison du gouvernement au style gothico-vénitien fait partie de ces curiosités.
 
Bakou by night
 
Face aux eaux huileuses de la mer Caspienne, le Bulvar est le poumon de Bakou où l’on enfourche une bicyclette louée (sur un parcours défini). Le soir, cette Promenade des Anglais locale accueille les familles, les joggeurs et les pêcheurs. Et puis, la nuit tombe. La ville scintille de mille lumières habillant les façades. On se croirait dans les pages des Mille et Une Nuits pour peu de descendre au Four Seasons, un palace aux airs haussmanniens. Le salon de thé-bar-restaurant décline lustres, miroirs et bouquets de fleurs sublimes. Devant l’entrée, le bling-bling s’affiche en 4x4 derniers modèles, Lamborghini ou Bentley. On hèle un taxi (londonien !) pour aller au Chinar, où les VIP se retrouvent dans les nuées de chicha, thé, vodka et jolies filles apprêtées du Brushing au bout des ongles. La nuit se finira au Pasifico, lounge et boîte de nuit sur le Bulvar avant, peut-être, de filer dans un improbable karaoké. Si l’islam est plutôt modéré, les traditions sont fortes. On pourra aussi goûter aux mélodies locales en dînant auMugham Club, dans un ancien caravansérail.
 
Les dessous de Bakou
 
Plus de vingt ans après l’explosion de l’URSS, la même famille Aliyev dirige le pays d’une main de fer. Le pétrole et le gaz ne profitent qu’à certains clans, laissant beaucoup d’Azéris sous le seuil de pauvreté. Aussi, cette dictature fait tout pour redorer son image à l’étranger. Après l’Eurovision 2012 et le lifting des façades façon Potemkine, c’est au tour de l’art contemporain « officiel » de s’afficher dans des expositions comme Fly to Baku, ou encore celles de la fondation Yarat !. La très glamour fille du président, Leyla Aliyeva, artiste (exposée, bien sûr) se lance dans le cinéma. Elle sera producteur exécutif du film Ali et Nino, d’après le célèbre roman du Caucase signé Kurban Saïd, saga romanesque, passionnante, mise en scène par Christopher Hampton (scénariste des Liaisons dangereuses, réalisé par Stephen Frears). Une autre façon de contrôler l’image du pays et, peut-être, de revoir l’histoire.
 
Carnet d'adresses :
 
Dormir
 
Four Seasons Baku
Ouvert en 2012 aux portes de la vieille ville, l’hôtel est un écrin de luxe derrière sa façade classique. Au pays du pétrole, les chambres sont étonnamment épurées. À noter, le restaurant italien Zafferano et, au 9e étage, la table Kaspia dont les spécialités sont le poisson et les grillades avec vue sur la mer. Sous une longue verrière, la piscine est un bonheur ! 
Double à partir de 340 € avec petit déjeuner.
77-79 Neftchilar Avenue. 
Tél. : 00 994 12 404 24 24.
 
Sultan Inn
L’un des premiers boutiques-hôtels implanté à Bakou il y a déjà quelques années. Son charme est d’être au cœur de la vieille ville.
Double à partir de 150 € avec petit déjeuner.
20 Boyuk Gala, Icheri Sheher. 
Tél. : 00 994 12 437 23 05 10. 
 
Sortir
 
Mugham Club
À l’ombre des figuiers, dans la cour de ce beau caravansérail, on se régale autour d’une table de spécialités locales avec un verre de vin d’Azerbaïdjan. Concerts réguliers.
9 Rzayeva Street, vieille ville. Tél. : 00 994 12 492 40 85.
 
Chinar
Restaurant-lounge, c’est le rendez-vous de la jeunesse locale dorée.
1 Shovket Alekperova Street 1, Sabail District. 
Tél. : 00 994 12 492 08 88.
 
Pasifico
Sur le beau Bulvar, face aux eaux de la Caspienne, ce lounge-boîte de nuit est l’une des dernières places to be. Les jeunes filles de bonne famille, glamour à souhait, sont toutes accompagnées d’un « chaperon », frère ou cousin.
Denizkenari Milli Park. Tél. : 00 994 12 493 12 21.
 
Piazza
Le dernier lieu où il faut voir et être vu… Ce lounge du Four Seasons est baigné de lumière naturelle filtrée par de grandes baies vitrées. Le soir, ambiance tamisée et magique.  
77-79 Neftchilar Avenue. Tél. : 00 994 12 404 24 24.
 
Gazelli Art House
La première galerie d’art contemporain indépendante a posé ses cimaises près de l’opéra local après sa galerie londonienne, à Mayfair.
93 Nizami Street. Tél. : 00 994 12 497 00 47.
 
Fondation Yarat !
Fondée en 2011 par Aida Mahmudova (nièce de la première dame), Yarat ! (« créer » en azéri) a pour ambition de développer la compréhension de l’art contemporain national et international en Azerbaïdjan. Elle organise jusqu’à fin septembre le Baku Public Art Festival.
31-33 Asaf Zeynalli Street, Icheri Shexer. 
Tél. : 00 994 12 437 39 70.
 
Musée d’Art moderne
Étrange musée à l’architecture un peu folle. Sur les murs, quelques grands noms qui semblent posés seulement pour la renommée des maîtres (Picasso et Dalí notamment). Les artistes locaux montrent des qualités dans l’inspiration-copie des impressionnistes, Picasso ou Van Gogh… C’est, finalement, assez amusant.
5 Yusuph Safarov Street. 
Tél. : 00 994 12 490 84 04.
 
Pratique
 
S’informer 
Azerbaïdjan, Le Petit Futé ; Baku, Hg2 (en anglais). 
 
À lire
Ali et Nino, de Kurban Saïd (éd. J’ai Lu) ; L’Orientaliste, de Tom Reiss (éd. Buchet/Chastel) ; Bakou, derniers jours, d’Olivier Rolin (éd. du Seuil).

source:www.madamelefigaro.fr

photo: Bérénice Debras

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