Jeudi 14 Mars 2013 à 11h58
Julie Mounier, avocate : “Les nouveaux “radars James Bond” inefficaces”
Me Julie Mounier, avocate spécialisée dans le droit de la circulation routière, était l’invitée jeudi de Jazz Radio pour l'émission Ça Jazz à Lyon.
L’Etat lance vendredi dans le département du Rhône sa nouvelle arme anti-chauffard : des radars invisibles embarqués dans des voitures banalisées qui flashent en roulant. En tant qu’avocate spécialisée, avez-vous déjà trouvé la parade juridique ?
"Il y a beaucoup de questions qui sont au cœur de ce "radar James Bond". On attend un peu de savoir quelle sera la mise en place. Il y a déjà des questions qui se posent, peut-être pas des failles. Notamment sur le positionnement du véhicule porteur par rapport au véhicule cible. Il faudra s’assurer que la distance est bien respectée. Tous les radars sont des appareils de mesure, ils répondent à des prescriptions d’utilisation très strictes par le constructeur. Dans le cas du radar mobile-mobile, il faut les respecter. Avec la distance, l’angle de visée, l’obligation pour l’agent de porter son uniforme à l’intérieur du véhicule…"
L’Etat-a-t-il fait un effet d’annonce ? Pour dire aux Français "nous sommes partout" ?
"Oui, on déshumanise totalement le contrôle et on se retrouve avec des mesures qui vont être faites par des radars avec une capacité de verbalisation exponentielle. Je considère que ce n’est pas un moyen de s’assurer d’une pédagogie de la sanction. Cela va être très surveillé par les automobilistes qui ne croient plus en ce système et qui ont l’impression de payer un impôt déguisé. C’est la limite du système."
Comment pourront faire les automobilistes pour contester ce genre de PV là ?
"Ils vont recevoir un PV électronique qui leur sera adressé. Ils devront payer le montant de l’amende.
Si vous contestez, vous allez recevoir vraisemblablement une proposition de transformation de la consignation. Mais sachant que le paiement de l’amende donne lieu au retrait des points. C’est une contradiction avec la volonté affichée de sanctionner les automobilistes pour le non-respect des limitations de vitesse. Parce que si on voulait vraiment les sanctionner, il suffirait de les interpeller. Et là il n’y a plus de problème d’identification du conducteur."
Sur le nombre de personnes qui viennent vous voir, la part de personnes qui n’ont pas enfreint la loi doit être infime ?
"Non ce n’est pas mon sentiment, il n’y a pas de mauvaise foi. Ils veulent s’assurer qu’ils sont bien l’auteur de l’excès de vitesse, que le policier qui les a arrêté ne s’est pas trompé de voiture. Quand on est automobiliste, il y a un doute."
Les chiffres vont toutefois dans le bon sens, la mortalité sur les routes rhodaniennes a baissé.
"Mais les excès de vitesse sont une cause de mortalité comme d’autres. Il y a plus à faire, à mon sens, sur les problèmes d’alcoolémie. C’est le principal fléau en matière de sécurité routière."
Avocat spécialisé dans le droit autoroutier, c’est une profession qui ne connaît pas la crise ?
"C’est beaucoup de travail parce qu’il faut être très rigoureux. Mais les clichés c’est "je roule avec ma grosse berline, je profite du malheur des automobilistes pour travailler". Ce n’est pas comme ça que j’envisage l’exercice de ma profession. Et surtout, on est les premiers défenseurs des libertés publiques. C’est une lutte de tous les instants pour obtenir les éléments qui vont permettre de s’assurer du respect du droit de la défense."
Source : www.lyonmag.com