Si elle n'avait pas déclaré la veille n'avoir aucune intention de «revenir en politique», on aurait pu penser qu'elle était en train de prendre date pour la présidentielle de 2016. Mais il s'agissait apparemment surtout de conclure en beauté un mandat, qui avait été quelque peu gâché par la calamiteuse crise de Benghazi et ses problèmes de santé. Bref, de faire partager au pays les leçons qu'elle a tiré de son passage à la tête de la diplomatie américaine. Son discours intervient alors qu'un débat passionné traverse Washington sur ce que doit être son rôle dans le monde, après une décennie de guerres lointaines et un accent omniprésent sur la lutte antiterroriste.
Tenir compte des réseaux sociaux
Hillary a beaucoup insisté sur le caractère mouvant des relations internationales et sur l'émergence d'une multitude de nouveaux acteurs et phénomènes dépassant le cadre institutionnel traditionnel des États. «Truman a construit le Parthénon» des relations internationales, un monde fait d'institutions et d'alliances entre nations, a-t-elle dit, parlant d'un «grand édifice», toujours debout et pertinent. Elle a évoqué l'importance des alliés traditionnels de l'Amérique, mentionnant l'Europe, et notamment la France, mais aussi les alliances asiatiques. Mais elle a ajouté que le monde avait besoin d'une nouvelle architecture «plus proche de Frank Gehry que des anciens Grecs», faite «d'un mélange dynamique de nouvelles structures et de nouveaux matériaux», pour faire face aux défis globaux de la crise financière, du changement climatique notamment.
«Les opinions des gens comptent désormais», a-t-elle dit, affirmant que l'Amérique devait se saisir de ce facteur, en s'appropriant les réseaux sociaux. Clinton a évoqué l'effort fait à ce sujet par le Département d'État, qui a recruté tout un nouvel état-major de linguistes et de spécialistes du web chargés de lutter contre les ennemis idéologiques de l'Amérique via twitter et les réseaux sociaux. Fidèle à un thème qu'elle a déjà largement développé, elle a marqué son attachement à la défense de la liberté d'Internet, et à l'accès des activistes des droits de l'homme à des réseaux en ligne protégés.
Hillary Clinton a aussi appelé à favoriser une diplomatie axée sur le développement économique, à travers la promotion d'accords de libre échange notamment, parlant aussi longuement de la nécessité de mettre en place une diplomatie de l'énergie, permettant de faire face au défi du changement climatique.
La cause des femmes, «le combat inachevé du XXIe siècle»
S'agissant des droits de l'homme, Hillary Clinton a focalisé son attention sur les droits des minorités, notamment homosexuelles ou religieuses… et sur les droits des femmes. «La preuve a été donnée que lorsque les femmes sont traitées en égales, le progrès, la démocratie et la prospérité s'installent», a-t-elle dit, parlant de la cause des femmes comme du «combat inachevé du XXIe siècle».
«J'entends déjà certains me dire: n'est-ce pas un peu trop doux comme approche? Et la force dans tout ça? Je réponds que c'est un faux choix… Oui nous devons être capables de soutenir nos paroles par l'action (militaire, NDLR) et nous allons continuer de détruire sans faiblir al-Qaida», a dit Clinton, évoquant notamment les nouveaux défis, «du Yémen à l'Afrique du nord». Mais, il y a des limites à la force comme à la diplomatie», a-t-elle jugé, voyant une illustration de ce phénomène en Asie, nouvelle priorité de l'Amérique où les deux approches sont nécessaires. Elle a appelé son pays à se renouveler et à montrer sa capacité à être leader au monde, au lieu de se reposer sur les lauriers du passé, «car aucune puissance n'a un droit de naissance au «leadership».
Une mise en garde à Moscou et Téhéran
Quelques heures plus tôt, la secrétaire d'État avait donné une ultime interview à quelques journalistes, occasion de répéter que la fenêtre de négociations avec l'Iran ne pourrait rester ouverte «trop longtemps». «Je ne vais pas me prononcer sur sa durée, s'il s'agit de jours, de semaines ou de mois», a-t-elle ajouté.
Clinton a par ailleurs souligné que l'Iran envoyait un nombre croissant de combattants en Syrie, pour soutenir le président syrien Bachar el-Assad. Elle a précisé que la Russie continuait elle aussi d'envoyer de l'aide à Damas, et exprimé sa crainte d'une extension rampante du conflit, mettant en garde Moscou et Téhéran contre les conséquences dangereuses de leur soutien persistant à leur allié.
Source : www.lefigaro.fr