"On ne naît pas bipolaire, on le devient" : une Lyonnaise tente de briser les tabous autour de la bipolarité

"On ne naît pas bipolaire, on le devient" : une Lyonnaise tente de briser les tabous autour de la bipolarité
"La psychiatrie ce n’est pas l’endroit des fous" : le livre d’une Lyonnaise dévoilant son histoire avec sa bipolarité

Diagnostiquée bipolaire, Nina Siahpoush-Royoux écrit un livre pour raconter son parcours face à sa maladie, un récit sans langue de bois.

Nina, une jeune journaliste de 28 ans originaire de la région parisienne, est venue s’installer, il y a un peu plus d’un an à Lyon, pour prendre l’air après une période de vie assez compliquée. Lors de notre échange, elle nous a raconté les chamboulements qui se sont déroulés dans sa vie au cours de l’année 2020. "Nous sommes partis avec mon père et ma tante en voyage au Japon au début de l’année 2020. Je partais déjà avec un début de burn-out en partant de Paris, mais là-bas, j’ai vécu un gros chamboulement émotionnel. Entre le décalage horaire, le manque de sommeil, l'excitation de vouloir profiter de toute la ville, la spiritualité du pays, il y avait une sorte d'effervescence telle, que j'ai enchaîné les insomnies de 3/4 heures pendant 10 jours", évoque Nina.

Un manque de sommeil très remarqué puisque Nina a commencé à avoir des hallucinations, se faisant déborder par un amas d’émotions aussi bien positives que négatives. « Un soir, j'ai fait une bouffée délirante aiguë. C'est le terme. Et beaucoup de bipolaires même de schizophrènes d'ailleurs, ont ce type de rapprochement avec la spiritualité, une façon de se sentir très connecté à l’au-delà ».  

"Le retour en France après le voyage, ça a été le début du reste de ma vie"

Rentrant à Paris à la suite de son voyage, elle se rend compte qu’il y a quelque chose qui ne va pas, et se retrouve hospitalisée en urgence. "Je perdais pied. J'avais plus aucune logique dans ma façon de parler. Je radotais, j'étais en boucle sur certaines choses. J'avais tous mes traumatismes qui ont rejailli d'un coup."

Directement internée au sein du service psychiatrique, la jeune journaliste est restée un mois au sein de l’établissement de santé.

"Pendant 1 mois, c’était une véritable pause, j’étais obligée de dormir."

"On ne naît pas bipolaire, on le devient"

Un moment de pause qui aura permis au médecin de mettre des mots sur ses maux, en posant le diagnostic de la bipolarité.

"Je n’ai pas eu de choc en apprenant le diagnostic. Il a été posé de façon tellement logique. Toute ma vie j’ai couru après la recherche de qui j’étais réellement. Je faisais plein de tests de personnalité quand j’avais 10 ans. Finalement, ce diagnostic a expliqué beaucoup de choses, comme pourquoi j’avais des crises maniaques et des crises dépressives..."

Les crises dépressives chez certains sujets peuvent être assez fortes, allant jusqu’à avoir des envies suicidaires. "Moi, j’avais cette petite voix qui m’enlevait ces idées de mon esprit, mais tous les bipolaires ne l’ont pas".

Les médecins ont alors joué aux "petits chimistes" pour trouver le bon traitement et surtout le bon dosage. Aujourd’hui elle a un traitement tous les soirs, qu’elle diminue avec le temps, mais qui est adapté à son rythme de vie et à sa pathologie.

"La psychiatrie ce n’est pas l’endroit où se trouvent les fous ! Il y a toutes les couleurs, il y a tous les âges, il y a tous les milieux sociaux. On est tous réunis, c'est un joyeux bordel. Moi ça a été une vraie béquille". 

Une période de transition qui a été longue lors de la mise en place du traitement, qui nécessite une période d’adaptation. "Je ne claque pas des doigts pour devenir une meilleure personne. D'un coup, ça y est j’ai un médicament, tout est solutionné, ce n’est pas comme ça que ça marche. Il faut y mettre du sien, c'est un vrai travail, donc on ne guérit pas de la maladie, mais on peut apprendre à vivre avec. Ce médicament me permet d’aller au lit beaucoup plus vite et je me rends compte que dormir, c’est génial !".

Aujourd’hui, Nina apprend encore tous les jours à vivre avec sa maladie et avec ses symptômes. À travers l’écriture de son livre « Bipolarité. Du délire à la renaissance », elle souhaite briser les tabous sur cette maladie peu connue du grand public et très souvent stéréotypée.

"Ce livre, c’est ma façon de parler de ma maladie. Voilà ce qui m'est arrivée, voilà ce qui se passe dans la tête d'une bipolaire. Il y a un gros tabou professionnel sur cette maladie, et pour moi la meilleure réponse, c'est de prouver que tous les matins, je suis là, à mon poste. Aujourd’hui, j’ai un métier, j'ai un CDI, j'ai un appartement, je suis propriétaire, j'ai un chéri, j'ai un chien. J'ai une vie tout à fait classique entre guillemets. Donc oui, c’est possible de vivre normalement."

Après avoir écrit son livre, elle décide également de s’investir sur les réseaux sociaux afin de poursuivre la diffusion de son message et de contribuer à lever le tabou autour de ce sujet. Une démarche qui permet aujourd’hui d’aider de nombreuses personnes touchées par cette maladie, ainsi que celles qui côtoient des individus bipolaires, en leur offrant enfin une meilleure compréhension.

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