Carla Kirsch, le renouveau de la cuisine mexicaine à Lyon

Carla Kirsch, le renouveau de la cuisine mexicaine à Lyon
Alebrije - Maude Chuzel

Elle figure dans le guide des 109 publié par le Gault & Millau en cette rentrée. Carla Kirsch, jeune cheffe lyonnaise d’adoption, nous a ouvert les portes de son restaurant, où la cuisine traditionnelle mexicaine fusionne avec les spécialités françaises. Rencontre.

Perchée sur les hauteurs de Croix-Rousse à Lyon, la façade colorée de l’Alebrije se repère de loin, à l’angle des rues Belfort et Justin Godart.

Lorsqu’on pousse la porte de l’établissement, c’est une invitation au voyage, avec du rose, du bleu, de l’orange, du vert, … bref, de la couleur quoi.

L’ambiance y est chaleureuse. Face à nous se trouve le bar où trônent des verres à Margherita, des petits cactus et autres statuettes. Ça, c’est la partie de Vincent, l’un des deux gérants de l’établissement, qui assure également le service en salle pour une trentaine de couverts.

Un peu plus loin, on distingue la cuisine ouverte. C’est aussi le royaume de Carla Kirsch, cette jeune cheffe mexicaine de 31 ans également aux commandes du restaurant, installée à Lyon depuis près de 10 ans. Elle nous accueille, avec un grand sourire.

Carla Kirsch / David Girard Photographe

Carla Kirsch - David Girard Photographe

"À la base, je voulais être médecin, ou dentiste"

Pour mieux comprendre sa cuisine, il faut revenir quelques années en arrière, direction le Mexique.

C’est là que Carla a fait ses armes, lors d’une licence. Mais s’est surtout à sa famille que la jeune femme doit sa motivation. "On a toujours aimé manger chez moi, ma mère cuisine très bien (…) elle a toujours été à la maison, pendant que mon père travaillait". C’est aussi grâce à lui que Carla en est arrivée là. Fort de ses années passées à Lyon lors de ses études de médecine, son papa a ramené dans ses valises cette passion pour la gastronomie lyonnaise.

Pourtant au début, la jeune femme ne se destinait pas à une carrière dans la restauration, mais plutôt dans la santé. "À la base, je voulais être médecin, ou dentiste".

Porter une blouse blanche ? Très peu pour son père : "Il me disait toujours de ne pas faire médecine, car je n’aurais pas de vie, pas de vie de famille, que je devrais travailler pendant les weekends, les vacances…"  ironise la jeune femme. "J’ai choisi pareil, ou pire, et en plus c’est bien moins payé !" (Rires).

À 14 ans, l’idée de faire carrière en cuisine commence à se dessiner pour Carla. "Il y avait beaucoup d’émissions culinaires à la télévision, de chaines dédiées. Je me suis dit pourquoi pas ! ".

Quelques temps après, elle s’envole pour la France. Avant d’intégrer Paul Bocuse, elle a dû apprendre le français. Une année de fille au pair plus tard, la voilà dans les rangs parmi les élèves de l’institut, de 2014 à 2017.

C’est au fil de ces années, et notamment des stages, que Carla commence à se créer une identité, mélangeant sa cuisine familiale aux spécialités françaises.

Carla s’est heurtée aux saisons très marquées en France : "La première année, voir qu’au mois de novembre il n’y avait pas de tomates dans les étales du marché… je me suis dit que ce n’était pas possible !" se souvient la cheffe.

Mais la jeune femme a su s’adapter, en composant avec des produits de saison pour pallier au manque de certains ingrédients "On arrive à faire des recettes traditionnelles avec des produits français (…) on remplace par exemple certaines herbes par l’ail des ours".

Déconstruire l’image des spécialités mexicaines

L’une des volontés de Carla, c’est aussi de sortir des clichés dans lesquels la nourriture mexicaine se retrouve cloisonnée : "C’était très dur de voir que la cuisine de mon pays était présentée dans une boîte, où tu ouvres seulement un sachet… ou bien on a l’image du taco, du burrito…".

Dans son restaurant, la jeune femme ne propose pas de street food. "C’est comme si on disait que la cuisine française, c’est uniquement la cuisine des bouchons".

Alebrije - Maude Chuzel

Prendre son temps

Une chose est sûre, Carla n’aime pas l’ennui. Elle change d’ailleurs sa carte tous les mois, au grès des saisons et de ses envies.

Quand on vient à l’Alebrije, on prend son temps. On sirote tout d’abord un cocktail, fait à base de Chartreuse, jus et liqueur de poire, le tout agrémenté d’un peu de Mezcal artisanal, importé du Mexique.

On se laisse ensuite tenter par le menu découverte, avec le Mole Manchamantel (qui veut dire tâche-nappe), un plat à base de magret de canard accompagné d’une sauce fruitée.

Le voyage continue avec le Sablé Mazapan aux cacahuètes grillés, nougatine de graine de courge, crème vanille et glace à cacahuète salé. Un dessert cuisiné comme un plat, plein de générosité.

Que gusto !

Alebrije, 1 Rue Justin Godart 69004 Lyon. Ouvert tous les soirs du mardi au samedi. Réservation au 04 72 00 03 02

Léa Dusson.

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